Un nouveau producteur de fourme fermière à Roche !

« Nous sommes devenus populaires. C’est plaisant mais nous n’avions pas l’habitude. Le syndicat de la fourme de Montbrison devrait prévoir une cellule psychologique pour nous aider à gérer », s’amuse Christelle Masson, agricultrice et désormais maire de la commune de Roche. 

Un nouveau producteur de fourme fermière à Roche !

Une année 2020 particulièrement riche pour l’épouse de Christian et la mère d’Alexis, les deux autres membres du Gaec du grand pré. L’arrivée de la nouvelle génération a donné un nouvel horizon à l’exploitation et permis d’amorcer un virage. « Sans Alexis, nous ne l’aurions pas fait », reconnaissent les parents. Christian avait démarré l’aventure avec un poulailler industriel de 1000 m2 en 1988, puis Christelle avait repris l’activité laitière de sa belle-mère en 1993. En 2000, l’activité volailles avait cédé la place à l‘activité veau de boucherie, stoppée en 2016.

Le Gaec produit 200 000 litres de lait livrés à ELS à Sauvain. « Il y a une certaine continuité à produire de la fourme aujourd’hui car on respecte le cahier des charges de l’AOP depuis 30 ans », avance Christelle.

Un jeune formé et motivé

Bien dans ses bottes, le jeune Alexis est attaché au patrimoine familial. « Mes arrière-grands-parents fabriquaient de la fourme », lance-t-il en guise de clin d’œil. Il s’est engagé dans le métier avec ambition mais en gardant les pieds sur terre. « Pour m’installer, il fallait dégager un revenu supplémentaire. Nous avons évoqué plusieurs possibilités : un atelier allaitant, une augmentation du troupeau laitier… avant que le projet de fabrication de fourme s’impose. »

Alexis est parti se former à l’Enilv (École nationale d’industrie du lait et de la viande) d’Aurillac puis auprès des opérateurs de la fourme de Montbrison. « J’ai fait des stages chez chacun des transformateurs », précise-t-il, comme une preuve de la solidarité au sein de la filière et de conscience de l’importance de la transmission du savoir-faire.

Le Gaec a investi près de 300 000 euros sur 15 ans et avec 30 % d’aides de l’Europe et la Région dans un bâtiment qui fait une large place au bois. Il a été volontairement surdimensionné. « Au cas où… » sourit Alexis, qui se dit prêt, à terme, à embaucher si l’activité le permet. La fromagerie a été terminée fin avril et Alexis a reçu l’agrément de l’organisme certificateur dès le mois de juillet pour produire ses premières fourmes AOP : « Je fabrique deux fois par semaine », précise-t-il.

Une fois moulé, le fromage passe huit jours sur le chéneau en épicéa, où il est retourné matin et soir, pour prendre sa célèbre croûte orangée. Il est ensuite affiné environ trois mois, bien plus que le seuil minimum prévu par l’AOP (32 jours).

« Pas besoin d’étude de marché… »

Titulaire d’un BTS en commerce, Alexis se fait plaisir dans la valorisation de son produit. Il vend au marché de Montbrison, au magasin de producteurs de Boën-sur-Lignon, à l’Amap de Saint-Bonnet-le-Courreau et à l’épicerie de Lérigneux. Du local ! Vous pouvez aussi vous procurer de la fourme directement à la ferme. La famille Masson conseille de venir « à l’heure de la traite du soir, vers 17 heures ».

Le commerce de fourme est aujourd’hui tiré par une forte demande. Pour l’instant, Alexis fabrique 25 fourmes par semaine, « et nous n’avons pas encore d’étiquettes ni de cartes de visite… ».  Il vise le double à terme, une fois le rythme de croisière atteint, ce qui représentera l’équivalent de 50 000 litres de lait par an.

Jamais trois sans quatre

La fourme de Montbrison compte avec Alexis son troisième producteur fermier (avec La ferme Plagne et le Gaec des Épilobes), en attendant un quatrième, du côté de Noirétable, à l’autre bout de la zone fourme.

Le président de l’AOP, Hubert Dubien, arbore donc un grand sourire. « Quand je suis arrivé à la tête de l’AOP, nous n’avions plus de producteurs fermiers, ça manquait de sens. J’ai sensibilisé le conseil d’administration sur le sujet. On s’est retroussé les manches pour accompagner les porteurs de projet.  On leur apporte un soutien technique. On rétablit ainsi un équilibre : des transformateurs industriels, artisanaux et des fermiers. Tous ces acteurs sont complémentaires, la concurrence n’est pas un problème. On crée des emplois et on contribue à l’aménagement du territoire. » Et ce n’est pas le maire de Roche-en-Forez qui s’en plaindra.

Au-delà des retombées financières, les éleveurs sont aussi rémunérés en fierté. « C’est une reconnaissance de notre travail après 30 ans d’intégration », reconnaissent les parents, heureux de constater également que leur fils n’entend pas tout sacrifier à son travail et est revenu chercher aussi une qualité de vie.

David Bessenay